Dimanche 12 février 2017... cinq mois à croupir au fond de son lit médicalisé...
Nous avons dormi... je me suis couchée à minuit, relevée à quatre heures pour lui donner sa morphine, puis à sept heures dix et réveillée à neuf heures dix... il était apaisé.
Ce matin Corinne arrive pour les soins et Maurice va toujours plus mal. Après son départ il demeure dans un sommeil comateux où il se plaint durant des heures. Il demande souvent :
–Mais, je suis où, je suis où ?
Ou bien :
–Tu me parles ?... alors que je ne dis pas un mot.
Il souffre trop de sa prostate, des démangeaisons horribles provoquées par ses œdèmes... il reste douloureux et incohérent jusqu'au repas.
À midi, je lui donne une tranche de foie de veau, mais il ne veut rien d'autre sauf un peu de salade de fruits.
Puis il reprend ses gémissements. Les doses de morphine très largement insuffisantes ne lui permettent pas de trouver un soulagement durable.
Notre médecin traitant opposé à son augmentation sous-estime totalement le drame que vit Maurice en fin de vie depuis quatorze mois où ses œdèmes cardiaques coulent abondamment par les jambes et les pieds et maintenant par le ventre.
Que l'on m'explique si l'on peut vivre longtemps comme ça alité et pissant l'eau. Maintenant, depuis son blocage de la jambe gauche le 12 septembre 2016 et son opération du 25 novembre, la situation n'a jamais été aussi désespérée et totalement précaire.
Il croupit au fond de son lit depuis cinq mois ! ! ! Les médecins l'ont opéré alors qu'il était dans une situation catastrophique, plus mort que vivant et voilà le résultat, dix fois pire qu'avant !
Il supporte l'oxygène 24 heures sur 24, la sonde à demeure, le PICC line et sa perfusion deux fois par jour !
Demain j'appellerai 'Betek Pen' pour qu'il fasse diligence pour le traitement de sa douleur... Maurice n'en peut plus.
Maintenant il dort sans cesse parfois apaisé, et souvent en crises de douleur... il voit et entend des voix... il se perd dans le temps et l'espace et dans des propos insensés. Parfois il réalise qu'il tient des paroles complètement incohérentes.
Et puis il déclare très souvent qu'il veut mourir, que c'est pas une vie que de vivre ainsi gisant en travers de son lit, toujours couché sur sa hanche gauche, sans pouvoir bouger, ni même pouvoir s'asseoir dans le lit. Il mange couché et ne peut même pas voir les images de la télévision, souvent maintenant il éteint tout car de toute façon il ne parvient plus à suivre un film depuis sa double trépanation en octobre 2014.
J'essaie souvent de lui mettre son coussin-serpent pour le caler un peu sur le côté droit, mais en ce moment il n'a pas la force de le supporter. Il s'enfonce dans un gouffre de fatigue, d'épuisement total.
Nos voisins passent nous voir pour la bonne année. Ils nous offrent deux bouteilles de cidre et apportent des moules et des huîtres sauvages. Ils s'attristent de trouver Maurice dans cet état.
Corinne revient ce soir pour les soins. Maurice manque d'oxygène au moment de la toilette, c'est de pire en pire... il s'étouffe et devient tout noir. Je remonte à trois la pression d'oxygène. C'est peut-être le manque d'oxygène qui lui donne des délires, des hallucinations.
Il dîne de deux petites tranches de saucisson et de deux cuillères à soupe de riz au lait et il s'endort... il devrait dormir longtemps cette nuit comme la nuit dernière où je ne l'ai pas entendu crier.
Il fait très froid aujourd'hui, le vent se fait pénétrant et quoique bien habillée, j'ai froid dans la maison.
Le bouc du voisin passe son temps près de nos biquettes contentes de retrouver un copain. Il traîne devant leur enclos, parfois il saute le muret qui cerne la maison, une fois pour entrer, une autre fois pour sortir, heureusement qu'il est castré ! J'ai oublié de le prendre ne photo... demain, je le ferai.