Jeudi 9 février 2017... une consultation ahurissante !
Je m'endors près de lui jusqu'à une heure du matin, ensuite s'ouvre la phase de sommeil semi-conscient, faite de cris, de cauchemars, d'hallucinations et de divagations... cette nuit il devenait millionnaire par spéculation... CCCCHUT ! Cette crise a été longue et pénible, d'autant qu'il s'est plaint de la tête et je lui ai apporté en plus d'un doliprane 1000, un gant d'eau très froid.
Vers quatre heures il s'endort profondément et je file au lit. Je dors jusqu'à huit heures... je me lève pour ouvrir la porte et Sylvie apparaît sur le seuil.
Corinne arrive et commence les soins, puis les miens. Je m'habille et prépare les papiers pour la consultation chez le pneumologue au CHRU de Brest. Avec Sylvie nous dégageons l'espace pour laisser passer le brancard.
Nous mangeons rapidement et nous attendons les brancardiers. Ils arrivent à treize heures quarante-cinq, ils ont maintenant une grande habitude de ce patient hors norme et du trajet qu'ils doivent emprunter pour aller le chercher.
Ils nous installent dans l'ambulance et nous partons. Christophe et Fabrice font partie de l'escadrille de brancardiers d' Urgence 29, une équipe qui se fait remarquer par leurs compétences, leur immense gentillesse et une excellente approche humaine. Enfin, nous les apprécions tous énormément.
Durant le trajet, Maurice devient blanc comme un linge et se plaint d'une douleur cardiaque aiguë. J'ai oublié de prendre le natispray et je le regrette bien car il a vraiment très mal.
Nous arrivons après deux heures de route au CHRU de Brest et nous déambulons dans les couloirs avant de trouver la pneumologie au fin fond du service après la cardiologie. Nous attendons dans le couloir car nous sommes arrivés en retard d'un quart d'heure.
Puis après deux patients devant nous, le pneumologue ne s'approche pas de Maurice, il ne vient pas le saluer, ni faire le point avec lui. Non, il me fait venir dans son bureau pour me parler de mon époux. J'ai pris le respirateur avec moi, je pense qu'il va le vérifier au minimum... mais que nenni, il se contente des petits résultats récoltés par l'employé d'Archipel Santé il y a quelques mois en arrière... me dit que si Maurice garde son respirateur, ses apnées sont très bien couvertes par l'appareil... et c'est tout... je lui signale qu'il ne parvient pas à la garder, que cela doit pousser son cœur déjà trop fatigué. Non me répond-t-il, c'est tout le contraire... eh bien, ce n'est pas l'avis du Docteur LECAM de Lyon... je peux à peine parler de ses problèmes, visiblement il n'en a cure... pourtant bien gentil ce toubib mais là, je reste scotchée par une telle désinvolture !
Quant à Maurice il ne décolère pas de cette façon cavalière d'accueillir ses patients et les faire venir d'aussi loin pour si peu ! Cela aurait pu tout aussi bien se régler par téléphone ! Cela aurait éviter un grand risque, une énorme fatigue à Maurice et une facture d'ambulance à la Sécurité Sociale !
N'empêche que c'est la deuxième visite que je veux annuler et je n'avais pas tord quand je vois le résultat. Eh bien, pour celle du 27 février, j'y réfléchirai à deux fois avant de faire transporter Maurice dans de telles conditions et tellement malade ! Ils se fichent de nous tous ces toubibs !
Nous rentrons. Maurice discute lucidement avec Fabrice et pour la première fois depuis bien longtemps, je le surprend à rire de bon cœur. Puis il se sent de plus en plus mal sur le brancard et il s'impatiente à rentrer, pris de démangeaisons intempestives.
Lorsque nous arrivons Christophe et Fabrice m'aident à descendre et je rentre pour ouvrir la porte de la véranda par derrière. Ils ramènent le brancard dans la maison et installent Maurice dans son lit. Puis ils nous quittent.
Juste après être bien installé, j'ai eu le temps de ranger autour de lui, voilà Corinne qui vient le laver, le masser, lui passer sa perfusion, lui donner ses soins. Puis elle me colle des patchs de Versatis dans le dos... cela ne me fait pas grand-chose sur mes douleurs sauf de me brûler la peau.
Maurice avait envie d'un bon gros casse-croûte à la cafétéria mais je n'ai pas pris d'argent sur moi. Il râle. Il attendra de manger à la maison. Et qu'y a t-il à manger ce soir ? De la soupe... bah !... Yaourt, biscuits !... T'as pas autre chose de mieux ?... De fines tranches de lard à griller ! Chic avec des cornichons aigre-doux ça peut aller !
Lorsque Corinne nous quitte, je prépare le repas et j'apporte à Maurice trois tranches de lard très fines. Quand il a fini son dîner, il commence à s'agiter dans le lit, victime de démangeaisons de ses œdèmes sur ses deux jambes et sur son ventre. Je dois le masser avec de la crème comme chaque jour, chaque nuit sans relâche.
Puis soudain il prend un mal de tête très violent et de nouveau il se perd... il confond le gant d'eau froide que je lui tends avec le petit coussin qu'il se place sous la tête... il recommence à divaguer, à parler fort, à crier, à se plaindre, il sombre dans un sommeil profond trois minutes et sursaute, il parle fort, s'embrouille dans ses phrases, puis il gémit, murmure et dit qu'il va mourir bientôt.
Il prend très fort mal à la sonde et j'ai bien peur qu'il faille s'en séparer... la nuit s'annonce sous de très mauvais auspices.
Moi, je suis brisée par ce voyage de quatre heures où l'ambulance maltraite mon corps endolori. J'ai mal de partout à une échelle de 8, voire 9. Je n'en peux plus... je n'ai qu'une envie me coucher, me reposer, allonger ce corps si douloureux... mais il semble que ce soit encore interdit pour cette nuit !
Pendant ce temps il a trop chaud après avoir eu froid, sa respiration est toujours aussi mauvaise et sifflante, il parle, me cherche, il souffle, pousse, étouffe, perd sa lunette... cela présage de bien des tourments à venir.