Vendredi 3 février 2017... vers un supplément de douleurs accrues...
La nuit battue par des vents forts et une grosse pluie se déroule comme les autres en pire, comme chaque fois davantage... je le change, je reste une partie de la nuit à ses côtés où il gémit, se plaint, se gratte, parle et délire, crie et je demeure impuissante sauf à recourir à toutes ses demandes le masser, le changer, l'aider à prendre ses remèdes. Il fait tomber ses ustensiles de très nombreuses fois, perd sa lunette d'oxygène, prend une douleur cardiaque accompagnée d'étouffements qu'il fait passer avec une dose de Natispray, ce que je redoute pour son œdème cérébral.
J'attends qu'il trouve un peu de repos, un peu de sérénité pour pouvoir aller dans la chambre. J'ai froid aux pieds, mal au dos, aux jambes, de partout... je vais au lit mais je dois me relever encore et encore et encore... au matin à six heures trente je le change, et je retourne au lit dans l'espoir de dormir un peu jusqu'à neuf heures ce qui me ferait le plus grand bien... mais Sylvie arrive et découragée, je me lève pour déjeuner.
Lorsque l'infirmier vient, je lui demande pourquoi dans le pilulier de Maurice il y a deux fois moins de médicaments ! Il me dit qe c'est le médecin qui l'a dit comme ça ! Il est en train de se planter car la dernière fois le médecin contre notre décision m'a fait remettre le diurétique... et que je sache il n'a rien retiré de l'ordonnance au contraire.
Indignée, je pique une colère froide et juste. J'en ai marre, marre, vraiment plus que marre !
Notre vie est saccagée, dévastée, invivable et nous devons encore supporter ces confusions et ces acharnements stupides !
La médecine tue dix fois plus que les routes, il serait bon que les médecins en prennent conscience et se remettent réellement en cause.
L'infirmier arrive avec le nouveau diurétique le Lazilix – furosémide (de sinistre mémoire pour nous deux) en générique comme ça je ne le reconnais pas et du DiffuK évidemment quand on lave le corps à grands coups de diurétique le potassium s'effondre et c'est l'arrêt cardiaque ! ! !
Hier le médecin a dit :
–Si le produit ne passe pas avec la sonde, il faudra l'arrêter de suite !
Jean-François pratique les soins. Pose la perfusion d'antibiotique, puis le perfusion de Lazilix... puis il s'en va pour revenir à treize heures quinze.
Mais que se passe-t-il Maurice a à peine le temps de manger cinq petits morceaux de foie de veau qu'il se tord de douleur... la sonde ne fonctionne plus, tout passe à côté ! L'essai ne sera pas allé bien loin, mais n'empêche qu'il faudra peut-être retirer la sonde à présent.
Lorsque Jean-François arrive il nous montre la poche rebondie d'urine comme une outre débordante. Je suis estomaquée... ça pour faire pisser, ça fait pisser ! Pauvre cœur malmené par un tel harcèlement !
Mais Maurice n'en peut plus... à moitié sonné il ne peut que répéter qu'il ne veut pas de ce traitement sans convaincre l'infirmier qui le nettoie, le change et lui remet une dose d'antibiotique... je croyais qu'il lui avait mis avant d'après ce qu'il venait de me dire.
Bref, le téléphone sonne... je ne parviens pas à l'attraper, je le laisse tomber... puis il sonne à nouveau. C'est le médecin qui est très déçu car la sonde a due être mal posée. Pour moi, ce n'est pas le problème, je lui renouvelle notre position, l'expérience passée en 2009 suffisamment longue et douloureuse nous a démontré qu'il ne sert à rien de vouloir faire pisser les œdèmes d'un cœur insuffisant et très affaibli, celui-ci en contre partie en fabriquera trois fois plus. Je considère cela dès à présent comme un acharnement thérapeutique inutile et douloureux qui ne va pas dans le sens d'un apaisement, du soulagement souhaitable pour mon époux qui, il ne faut pas se voiler la face ne pourra plus vivre ainsi indéfiniment.
Lorsque l'infirmier nous quitte Maurice est dévasté par la douleur de toute part, il s'endort vaincu. De mon côté je suis sous pression, vidée d'être obligée de tenir notre position face au médecin et à l'infirmier qui prétendent le soulager de cette manière, épuisée de voir Maurice souffrir ce calvaire infernal.
En 2009, au bout de cinq mois d'un régime lazilix à 750 mg (dose extravagante) de diffuK à haute dose évidemment, avec une sonde à demeure qui lui provoquait une orchite grosse comme une pastèque, l'oxygène 24 heures sur 24 produite par un extracteur, au bord de la mort, la toubib des soins palliatifs voyant deux ballons à la place des pieds s'est écriée :
–Jamais vu ça, jamais vu ça ! ! !
Pourtant qu'est-ce qu'il a pu uriner durant cinq mois et malgré cela Maurice était gonflé comme une baleine avec des ballons à la place des pieds (on ne voyait plus ses orteils!). Coincé dans son lit sur le dos, victime d'œdèmes cardiaques carabinés, il mourait aussi d'une overdose médicamenteuse sévère.
En plus du régime cité plus haut il avalait 42 comprimés par jour dont du Plavix à vie, ce qui a eut le mérite de le rendre hémophile... on s'étonnera qu'il ait fait une sévère hémorragie cérébrale en octobre 2014 après être tombé des dizaines de fois sur la tête à cause du Zanidip d'où sa double trépanation du cerveau en novembre 2014 (sans anesthésie !)
En octobre 2009, sur le fil de la mort, j'ai conduit mon époux auprès d'un gastro-entérologue qui le découvrant dans une telle impasse a misé le tout pour le tout et l'a totalement démédicalisé. Ce qui a eut pour effet de le faire fondre instantanément et de lui sauver la vie.
Il a survécu quatre belles années avant de retomber sur un toubib qui lui a prescrit Zanidip (pour la tension, ce qu'il ne faut pas pour un Parkinsonien) et Modurétic pour uriner (ce qui fatigue le cœur, plutôt déconseillé sur un insuffisant cardiaque tel que mon époux) et l'on voit où cela nous a conduit...
Il est cinq heures, Éliane, mon amie me rend une petite visite qui me réchauffe le cœur. Puis arrive l'infirmier pour les soins du soir. Maurice se trouve bien installé mais tellement épuisé qu'il n'ouvre pas l'œil. Il dort tant bien que mal avec sa respiration toujours aussi difficile. De temps à autre il perd sa lunette. Je lui ai replacée trois fois cet après-midi.
Il fait un temps menaçant... la météo nous promet trois belles tempêtes, cela va souffler fort ici...
Cependant que j'écris, je perçois Maurice qui respire fort... je vais voir. Il se trouve comme un poisson hors de l'eau, haletant. Il a perdu sa lunette d'oxygène. Il faut absolument que je fasse quelque chose, cela lui arrive trop souvent. Je mets la main sur du sparadrap et lui colle un morceau sur la tubulure qui traverse les joues.
Il dort profondément et du coup je prends mon repas seule à la cuisine. Tout à coup, j'entends un cri :
– Chérie, je veux me lever, je dois aller aux WC !
Je l'aperçois déjà avec les jambes hors du lit. Je lui explique qu'il ne le peut pas, il ne peut pas se lever et qu'il se rassure, cela va tout seul, il a une sonde !
Il remonte son drap et ses couvertures et se rendort aussitôt. Ouf, cette nuit, je ne le quitterai pas. Il faut le surveiller comme le lait sur le feu !
Pierre F. et Jeanne T. 04/02/2017 13:46