Vendredi 9 juin 2017... est-il permis d'autant souffrir quand il fait si beau ?
Maurice s'est endormi tôt et je l'ai suivi à vingt-et-une heures trente. À deux heures je l'entends tousser, très encombré il s'étouffe... je me lève dare-dare et je lui passe le propolis puis il me demande de lui masser tout le corps... enfin les parties que je peux atteindre.
Durant cinq mois son ventre s'est mis à désenfler, s'est assoupli et maintenant depuis quelques jours c'est trois fois pire qu'avant... son cœur est au plus mal... son œdème abdominal exagérément gonflé, dur et rouge se remet à faire d'énormes capitons prêts à s'éventrer... l'eau lui envahit le corps qui se durcit même sur les cuisses... les organes plongent dans l'eau et ses poumons sont pris. C'est très dur de le constater... je lui masse cette partie gauche de son ventre, ses cuisses, ses jambes... je ne peux plus le tourner... il ne le peut pas, il ne le veut pas, il souffre trop, il cyanose au moindre mouvement, au plus petit effort.
J'attends qu'il aille mieux et je retourne me coucher. Vers cinq heures, il me sonne. Je l'entends se plaindre fortement... il reprend des maux de tête. Je lui donne comme d'habitude un doliprane et 10 mg de morphine... il aura mal bien longtemps.
Puis il me sonne à sept heures... il a froid, je dois le recouvrir et il veut une brioche aux pépites de chocolat et un cacao bien chaud.
Je retourne au lit... c'est Nelly qui me réveille en entrant dans la maison. Elle prépare les tartines et un autre cacao à Maurice puis me chauffe mon café. Je déjeune. Maurice va mal... on aurait mal à beaucoup moins que ça... il va mourir... étouffé ? Je le redoute depuis si longtemps.
Je pars en courses avec Nelly... j'ai besoin de couches, d'alèses... de fournir ma carte vitale à la pharmacie... de prendre ce qu'il me manque... aussi un produit bio contre les escargots qui dévorent tout mon courrier, après les chèvres !
Pendant ce temps l'infirmier passe à la maison et embête Maurice en lui redemandant comme hier soir à quel niveau de douleur il se ressent... cela à l'art de le faire bondir et il se rebiffe... il faut être bien simplet ou pas très malin pour demander à une personne mourante son degré de douleur. N'empêche Maurice contrarié prend une douleur cardiaque lorsque je reviens. Je lui passe son natispray.
Nous prenons notre repas et je m'apprête pour aller nourrir les animaux et que vois-je ? Aig s'est sauvée de l'enclos... mais comment a-t-elle fait ? Tiens puis maintenant c'est Froudenn... zut alors... il doit y avoir un trou dans la clôture ! Je vais au garage prendre du grain dont elles raffolent... auparavant j'ai pris les quignons de mes pains 'zigzags tranchés'. J'arrive avec le petit fauteuil roulant électrique de Maurice que j'ai fait chargé au préalable. Mais dur, dur de les ramener à la raison... trop contentes de batifoler de partout autour de la maison et surtout de manger mes fleurs, le palmier qui se trouve là et mes fraisiers... ah, malheur ! J'ai beau crier 'mes fraisiers, pas mes fraisiers ! Rien n'y fait... ah, les chameaux ! Là-dessus voici mes amis et voisins qui arrivent avec une brouette pleine d'herbe et des déchets de légumes... tout le monde se précipite et aussi les biquettes... ouf, les voilà rentrées et Henk se met en devoir de réparer les trous du grillage... quelle chance qu'ils se soient trouver là ! J'allais batailler un moment !
Je reste dehors pour couper deux pleins seaux de fusain et un peu d'herbe. Mes petites protégées ont de quoi se nourrir, puis je rentre... justement l'infirmier est là... il semble avoir changer d'humeur par rapport à ce matin et hier soir. Mais je ne manque pas de lui faire des observations dans la salle de bains, cependant qu'il me soigne.
Il se retire. Un moment plus tard nous dînons... mais Maurice n'a pas faim. Il se contente d'un pain au chocolat, de quelques fraises et de deux abricots.
Il se sent très mal... la nuit risque d'être agitée... il somnole et gémit.
Le temps redevenu beau, le ciel bleu parsemé de nuages légers comme l'air donnent une touche de légèreté incroyable... une sérénité parfaite... en discordance avec notre vie...
Ce soir je ne peux m'empêcher d'être triste... la Cérémonie de Remise des Trophées 'Conte et Nouvelle' à lieu à Lauzun dans le Lot et Garonne, remis par les mains de Pierre Bellemare...
… et je n'y serai pas...