Jeudi 18 janvier 2018... peine, douleur, chagrin... papiers et encore papiers...
Une nouvelle tempête fracasse d'un bruit infernal la fenêtre près de laquelle je suis couchée... c'est épouvantable... cela me réveille à trois heures, je me lève et je me recouche. Je tente de me rendormir... en vain... impossible ! Le fracas trop grand me casse les oreilles et des pensées trop tristes m'assaillent.
Je me lève tout à fait et file sur l'ordinateur. Lorsque Sylvie frappe à la porte, je reprends sommeil. Elle arrive avec des petits croissants et du coup cela me boost un peu. Nous prenons le café ensemble en discutant, cela fait du bien à un moral en berne.
Je file me préparer car nous devons passer prendre le décodeur au relai. Évidemment j'ai encore une grosse lettre à poster... j'en ai cinq autres en attente de mes extraits d'acte de naissance (délai d'attente quinze jours !)... je me demande quand ils vont pouvoir s'occuper de mes dossiers... là aussi, il faut bien reconnaître que l'on abandonne les veuves à leur sort... je dois tenir sous le seuil de pauvreté... comme si l'État ne pouvait pas continuer à verser la pension de retraite du conjoint décédé durant trois mois le temps que tout soit en ordre ? Enfin si encore il ne mettent que trois mois !
Tiens justement au courrier je reçois une réponse de la Présidence de la République qui m'indique qu'il a envoyé mes requêtes au Préfet du Finistère.
Nous partons avec Sylvie qui se charge du fauteuil roulant, de la lettre, du décodeur. Bien entendu lorsque nous arrivons l'appareil n'a pas encore été livré... zut et zut... à refaire demain ! Les services m'avaient bien dit jeudi mais à quelle heure? Nous rentrons.
Je m'amuse à montrer des photos à Sylvie et nous restons ainsi une demi-heure à discuter autour. Cela me permet de tenir un peu. Elle s'en va lorsque l'infirmière arrive... puis je me retrouve seule.
Je prépare mon repas, je n'ai pas faim. Je prends une salade de crudités achetée toute prête. J'ai fait revenir quelques lardons avec des petits pois... cela ne me dit rien, j'en avale quelques bouchées et je garde le reste pour ce soir, un yaourt et terminé.
Je me mets à pleurer... et je décide de me déshabiller, de fermer la porte et de tenter de dormir puisque le vent s'est enfin apaisé... je pleure, Maurice me manque si fort... et je finis par m'endormir jusqu'à dix-sept heures trente.
Je me lève pour me remettre sur l'ordinateur. Je repense qu'il y a une ou deux choses que j'ai oublié de glisser dans mes enveloppes. J'ai aussi reçu un courrier de la banque après leur appel et du coup je complète aussi cette enveloppe.
Je songe soudain à appeler ma podologue. Du coup j'obtiens un nouveau numéro de téléphone et je peux lui parler, c'est magique.
Un appel téléphonique me confirme l'arrivée du décodeur au point relai.
Il est six heures trente, la nuit tombe, j'entends un oiseau appeler avec une grande insistance, un petit queue-rousse sans doute, je vais voir, je pense à Maurice.
Voilà la nuit s'avance, je vais souper, me remettre un peu sur l'ordi et tâcher de suivre un film sur mon appareil puisque la télévision est en panne depuis une semaine... Maurice n'aurait pas aimé en être privé, c'était encore un peu de vie qu'il voyait se dérouler sous ses yeux et nous étions ensemble...
… et comme il se plaisait à le répéter :
–Un jour de passé, c'est un jour de plus gagné près de ma p'tite femme !
Comme je réalise le sens profond de cette phrase, de son amour infini !
Mercredi 17 janvier 2018... absence, tristesse, chagrin, souvenirs...
Je dors mal avec la tempête qui mugit. Je suis debout à l'arrivée d'Annie.
Je déjeune et m'habille. Elle trie des bocaux de verre que nous allons jeter dans les bacs prévus à cet effet un peu partout ici. L'énorme poubelle qui s'est envolée il y a huit jours n'a toujours pas été remise à sa place, elle gît à présent contre mes hortensias sur le bord de la route.
Nous passons à la poste, à la mairie prendre des sacs jaunes et chez mes ami-e-s à la Pointe, mais leur boutique est fermée le mercredi mince !
Revenus à la maison Annie m'aide à sortir le décodeur et tous ses fils placés sous la télévision. Je dois le porter demain au magasin relai et l'échanger avec un neuf.
Puis lorsqu'elle a terminé son service, elle me quitte et voici l'infirmière. Elle passe beaucoup de temps a me curer le pied droit car ma podologue a disparue du paysage, en vacances sans doute.
Je passe l'après midi dans la tristesse et le chagrin, pour m'étourdir je classe mes photos et retrouve des souvenirs... je reste bien seule sans Maurice avec qui nous échangions tant de richesses, de curiosités, tant de forces et de soutien partagés... il me manque et me manquera cruellement désormais, comment vais-je pouvoir tenir sans lui ?...
Tenir, ne pas craquer !
Mardi 16 janvier 2018... vent et pluie balaient la presqu'île... tempêtes à répétitions...
Je me réveille à trois heures avec une tempête fracassante. La tête assaillie de pensées et de souvenirs, je ne parviens plus à me rendormir... au bout d'un long moment je me décide à prendre deux efferalgan même si cela ne fait rien sur la douleur, ces comprimés ont le mérite de me faire dormir. Effectivement je dors mieux sur le matin.
J'entends Sylvie et je me lève. Elle me prépare mon déjeuner puis je file dans la salle de bains. Elle doit m'aider à m'habiller. Ensuite nous sortons faire quelques petites courses. Au retour nous rangeons mes emplettes, puis je lui fais ranger le stock de pansements et de médicaments qui demeurent dans le placard. Elle glisse le tout dans sept gros sacs pour donner à l'infirmière... bon débarras !
Sylvie me quitte à onze heures trente, puis Céline arrive pour mes pieds... et elle s'en va.
Je reste seule... le moral toujours en berne. Pour le repas de midi je me prépare des nems, un yaourt, deux clémentines. Je me force à manger un peu... je n'ai envie de rien.
Je pense à nos repas pris ensemble... à ses souffrances... à tous ces jours, tant de jours où il ne bougeait pas de son lit et où son corps était si douloureux... c'est fini ! Il n'est plus là... il ne reste plus rien de ce temps.
Maintenant j'ai hâte de partir. Je me demande encore pourquoi il voulait que je reste ici... promets-moi que tu resteras là, m'avait-il demandé. Mais depuis cette époque tout avait changé et il a compris qu'il valait mieux que je retourne près des enfants. Lui aussi l'avait souhaité pour connaître ses arrière-petits-fils, il s'était impliqué dans la recherche d'un logement, cela l'intéressait et je lui imprimais le bien, les lieux et puis peu à peu je l'ai vu renoncé... son état déjà bien dégradé avait empiré les quarante derniers jours... il n'était plus là...
Cet après-midi le soleil joue avec les nuages et les averses...
Lundi 15 janvier 2018... fureur des éléments... sale temps...
Je me suis couchée tard, souvent réveillée, puis la tempête a surgi à trois heures du matin avec fureur... évidemment j'ai dû me lever pour monter le volet qui faisait un bruit de tous les diables !
J'entends Nathalie pénétrer dans la maison et je file à sa rencontre en fauteuil roulant comme toujours. Je l'envoie chercher le pain et deux croissants. Je déjeune et me prépare. Ensuite nous rangeons du linge. L'heure arrive vite pour elle de s'en aller.
Puis vient l'infirmière. Elle prend beaucoup de temps à me soigner mon pied. Elle découvre un trou sous la corne. Il faut espérer que cela ne s'infecte pas, que cela guérisse.
Je me retrouve seule l'après-midi où je poursuis des photocopies.
Je réclame de nouveaux actes de naissance, il m'en faut plusieurs et l'un de ceux que j'ai reçu ne porte pas la mention 'décédé'.
Je demeure sur l'ordinateur mais la tristesse et le chagrin m'envahissent... le temps me conforte dans cet état... moral dans les chaussettes !
J'ai perdu mon soleil, ma joie de vivre, ma force d'avancer, notre complicité... le trou béant de son absence s'agrandit de jour en jour !
Véronique PACAUD, auteure, éditrice, amie 18/01/2018 23:06
Henriette et Robert, des ami-e-s 18/01/2018 23:04